Le nombre de travailleurs étrangers a doublé en cinq ans

Jamais encore les entreprises belges n’avaient fait autant appel à de la main-d’œuvre issue d’autres pays européens. En 5 ans, le nombre de travailleurs détachés a ainsi doublé. C’est ce qu’indiquent les quotidiens De Tijd et L’Echo, et qui a été confirmé à la rédaction de la VRT. Ces travailleurs étrangers sont actifs en Belgique, mais payent des cotisations sociales dans leur pays d’origine. Le député Wouter Raskin (N-VA) réclame des mesures supplémentaires, mais n’obtient pas une adhésion générale.

Il ressort de la réponse du Secrétaire d'État à la Lutte contre la fraude sociale, Philippe De Backer (Open VLD, photo), à une question parlementaire du député N-VA Wouter Raskin que les sociétés belges ont fait 662.000 fois appel au système de "détachement" l'an dernier, pour bénéficier temporairement d'une main-d’œuvre étrangère. Dans 109.000 cas, ce sont des indépendants qui ont été appelés de l’étranger.

C’est un nombre record et cela représente même une augmentation de 100% du nombre de travailleurs étrangers détachés en l’espace de cinq ans.

Via ce système, une entreprise belge peut confier une mission temporaire à un travailleur ou un indépendant résidant dans un autre pays européen, qui est ainsi envoyé comme "détaché" dans le Royaume. Les cotisations sociales sont payées par les employeurs dans le pays d'origine du travailleur.

En 2016, ces missions de détachement en Belgique concernaient 190.000 travailleurs salariés et 27.000 indépendants, les Pays-Bas fournissant le plus gros contingent. Le système permet souvent, grâce à des cotisations sociales moins élevées ailleurs, de bénéficier d'une main-d’œuvre moins chère. Mais son succès s'explique aussi par certaines pénuries de personnes qualifiées sur le marché de l'emploi belge.

Davantage de mesures ?

Le député nationaliste flamand Wouter Raskin, qui a exigé les chiffres du Secrétaire d’Etat De Backer, qualifie ce système de concurrence déloyale. Il plaide en faveur de mesures supplémentaires. "A l’heure actuelle, des personnes étrangères peuvent travailler en Belgique jusqu’à deux ans sans payer de sécurité sociale dans notre pays. Nous estimons que ce laps de temps doit être réduit à six mois".

Raskin estime qu’il faut aussi considérer un système comme celui en vigueur aux Pays-Bas, où les travailleurs doivent payer des impôts dans le pays étranger où ils travaillent depuis au moins six mois.

Mais le Secrétaire d’Etat à la Fraude sociale, Philippe De Backer, n’est pas du tout d’accord. "Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Le système de détachement est très règlementé au niveau européen et veille à ce que des entreprises malintentionnées soient punies sévèrement. Nous devons veiller à ne pas créer de charge administrative superflue pour nos entreprises. Il y a aussi beaucoup de Belges qui travaillent à l’étranger".

Même son de cloche à la Fédération des entreprises de Belgique (FEB). "Il s’agit d’autre chose que le travailleur polonais", explique Monica De Jonghe dans le quotidien De TIjd. "Beaucoup de grandes entreprises dans les secteurs pétrochimique, du métal et de la chimie font appel à du personnel détaché. Il s’agit souvent d’Européens de l’ouest".

"Comment convaincre les personnes qualifiées de venir travailler en Belgique si elles ne peuvent pas verser leurs droits de sécurité sociale à leur pays d’origine ? Même chose avec les durées de détachement : pour les consultants, il est parfois nécessaire de rester plus longtemps en Belgique. Qu’allons-nous faire ? Les obliger à s’enregistrer en Belgique après 6 mois de travail ? Ce sera très compliqué", estime De Jonghe.

La commissaire européenne aux Affaires Sociales, la Belge Marianne Thyssen (photo), a préparé une proposition de modernisation du système de détachement. Le plan se concentre avant tout sur les droits des travailleurs qui déménagent, mais permet aussi aux pays de combattre la fraude sociale. Il doit y avoir "une répartition financière équitable » entre les pays concernés".

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