Le MIM célèbre le génie d’Adolphe Sax

À l’occasion du bicentenaire de la naissance du Dinantais (1814-1894) - qui fit surtout carrière à Bruxelles et Paris -, le Musée des instruments de musique de Bruxelles propose la grande exposition "Sax200". Elle présente les multiples facettes de ce clarinettiste, compositeur, chef d’orchestre, éditeur, pédagogue, mais surtout inventeur et facteur d’instruments, qui révolutionna le monde musical avec son saxhorn puis son saxophone. Plus de 200 pièces sont exposées au 4e étage du MIM, dont 133 instruments réalisés par Adolphe Sax et sa famille. Une exposition d’une exceptionnelle richesse historique et scientifique, à voir d’ici le 11 janvier 2015.

Antoine-Joseph dit Adolphe Sax est né le 6 novembre 1814, à Dinant. Son père, facteur d’instruments, l’initia très tôt à la construction des bois et des cuivres. Très jeune, Adolphe se mit lui-même à fabriquer des instruments. A 15 ans, il présentait deux flûtes et une clarinette à un concours.

Il étudia ces deux instruments à l’Ecole royale de chant de Bruxelles, tout en perfectionnant et développant de nouvelles clarinettes, notamment dans le registre grave. Dans les années 1830, il déposait ses premiers brevets. Ce fut le début d’une longue série d’inventions.

En 1841, le Dinantais déménageait à Paris et commença à travailler sur un nouvel ensemble d’instruments qui furent présentés en 1845 lors d’un grand concours devant déterminer quel type d’orchestre serait utilisé pour l’armée. L’ensemble proposé par Sax - comprenant notamment une famille de bugles à touches (baptisés Saxhorn) - l’emporta sur un ensemble plus classique avec plus de vents et moins de cuivres mené par Michele Carafa.

Sax l’inventeur

La première partie de l’exposition "Sax200" au MIM est consacrée à "Sax inventeur". Dans ses divers ateliers, Adolphe Sax fabriqua et perfectionna des instruments comme la clarinette, le cor ou l’ophicléide, mais il développa aussi plusieurs familles complètes d’instruments (du plus aigu au plus grave) - saxhorn, saxotromba et finalement saxophone -, dont le son homogène donna une nouvelle couleur sonore aux ensembles militaires notamment.

Le MIM expose pas moins de 133 instruments, dont 77 sont de la main de Sax et le reste sortirent des ateliers de son père Charles-Joseph, son frère Alphonse et son fils Adolphe-Edouard. La famille produisit au total au moins 40.000 instruments. Si le musée bruxellois en possède encore autant - dont le plus vieux saxophone conservé (un baryton de 1846) et des instruments de cuivre aux formes les plus originales - c’est que dès son ouverture en 1877 ses conservateurs successifs se sont appliqués à acquérir autant d’instruments de Sax et de sa collection privée que possible.

Le saxophone reste certainement l’instrument le plus connu d’Adolphe Sax, celui qui l’a rendu mondialement célèbre et qui a révolutionné le monde de la musique, à commencer par le jazz qui ne peut se passer de lui. Mais cet instrument hybride connut au 19e siècle un développement plutôt lent, notamment du point de vue commercial. Au départ, il ne représentait que 20% de la production de Sax, qui fabriquait davantage des saxhorns. La situation changea nettement au 20e siècle, lorsque la production fut reprise par des firmes dans le monde entier.

Sax entrepreneur

L’exposition du MIM illustre comment Sax devait faire face à la concurrence d’autres facteurs d’instruments, se vit intenter des procès pour avoir copié des instruments existants - mais les gagna finalement tous en prouvant ses développements réellement novateurs -, participa à de nombreuses expositions universelles (comme en témoigne une copie d’une vieille photo prise à Londres en 1851) où il présenta des trompettes à multiples pavillons, et développa un sax-tuba, des cloches, timbales et longues trompettes pour l’opéra (notamment pour "Aïda" de Verdi en 1880).

Réputé pour la fiabilité et la sonorité puissante de ses instruments, Adolphe Sax devint aussi fournisseur de l’armée avec des trompettes de parade, des clairons, des cors. A l’heure actuelle, les saxhorns et saxophones sont encore toujours indissociables des orchestres à vent, fanfares et ensembles militaires.

Sax intime

Toujours à l’aide de documents iconographiques et vidéos, mais aussi d’activités destinées plus particulièrement aux tous jeunes visiteurs, l’exposition "Sax200" lève également un coin du voile sur l’intimité d’Adolphe Sax. Doté d’une incomparable force de caractère, il était un homme érudit et cultivé, mais aussi sensible.

La maladie ne l’épargna pas et lui enleva plusieurs membres de sa famille proche. Sax connut aussi par trois fois la faillite, en raison de mauvaises alliances avec des partenaires, d’une mauvaise gestion ou de restrictions. La dernière faillite l’obligea à quitter son atelier à Paris. Il mourut d’ailleurs pauvre, le 7 février 1894 à Paris, à l’âge de 80 ans.

Sax n’était pas seulement inventeur, mais aussi un collectionneur d’instruments passionné. Il possédait 467 spécimens de pays et d’époques divers. Il s’intéressait beaucoup aux instruments extra-européens et populaires.

Sax après Sax

La 4e et dernière partie de "Sax 200" retrace l’évolution du saxophone, l’invention la plus géniale du Dinantais. Le brevet déposé par Sax le 21 mars 1846 fut valable jusqu’en 1860. D’autres facteurs se mirent ensuite à fabriquer et perfectionner le saxophone. En 1929, Henri Selmer rachetait la maison familiale à Paris à Sax fils. Plusieurs de ses instruments sont exposés au MIM.

Parmi les inventeurs de nouveaux types de saxophones, il faut citer le Munichois Benedikt Eppelsheim, qui développa le sopranissimo en si bémol aigu - le plus petit sax au monde -, mais aussi le Tubax (photo), un sax contrebasse créé il y a une dizaine d’années.

C’est certainement dans le jazz que le saxophone a trouvé son développement le plus spectaculaire. Comme en témoignent les nombreux instruments exposés au MIM : ceux des musiciens Coleman Hawkins et Dexter Gordon, ou encore celui aux couleurs du drapeau américain offert en 1994 au président de l’époque, Bill Clinton.

Autant de témoignages qui proviennent non seulement de la très riche collection du MIM, mais aussi de 25 autres collections privées et publiques, dont celle du Musée de la musique de Paris. Il ne faut pas oublier que c’est au Conservatoire de cette ville qu’Adolphe Sax dirigea la toute première classe de saxophone.

"Sax200"

L’exposition occupera le 4e étage du MIM jusqu’au 11 janvier 2015, au terme de ce week-end d’ouverture comprenant notamment des concerts gratuits. Une série d’activités pour les familles sont également planifiées tout au long de l’année à venir.

Situé Montagne de la Cour 2, à 1000 Bruxelles, le Musée des instruments de musique est ouvert du mardi au vendredi de 9h30 à 17h, les samedi et dimanche de 10h à 17h.

Pour plus de détails, consultez le site du MIM : www.mim.be ou www.sax200.be

Photo by Guy Kokken guy.kokken@skynet.be +32.476.250.167

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