L’industrie plaide pour le maintien du nucléaire après 2025

Les fédérations des industries technologiques (Agoria) et chimique et pharmaceutique (Essenscia), tout comme la fédération des grands consommateurs industriels (Febeliec) plaident en faveur du maintien en fonction d’au moins deux réacteurs en 2025, date prévue en Belgique pour l’arrêt de l’utilisation de l’énergie nucléaire pour la production d’électricité. Selon ces fédérations, la sortie du nucléaire coûtera au total 600 millions d’euros supplémentaires. Ce qui fera monter les prix de l’électricité jusqu’à 20%, tant pour les entreprises que les particuliers.

D’après les trois fédérations industrielles, qui veulent envoyer un message clair au gouvernement fédéral, la sortie complète du nucléaire en 2025 rendrait également plus difficile à gérer la réduction d’émissions de CO2 et donc plus difficile à atteindre les objectifs en matière de climat. C’est avant tout les augmentations de prix qui inquiètent l’industrie.

Dans le cas d’une sortie totale du nucléaire en 2025, les prix de la production d’électricité risquent d’augmenter de 15 à 20%, indiquent Agoria, Essenscia et Febeliec. Ce qui rendra cette électricité invendable aux entreprises et aux foyers. Les investissements dans des entreprises qui nécessitent beaucoup d’énergie risquent de rester à la traine. A terme, pareilles grandes entreprises pourraient même disparaître, parce que leur compétitivité sur le marché a diminué, estiment les trois fédérations.

"Maintenir le calendrier actuel pour une sortie complète du nucléaire d'ici 2025 rendrait le surcoût d'un système énergétique, avec une part croissante d'énergie durable, inutilement élevé pour les entreprises et les ménages", estiment dans un communiqué commun les responsables des trois fédérations. Ces derniers réagissent à la récente étude d'Elia sur l'approvisionnement énergétique. Le gestionnaire du réseau de transport d'électricité en Belgique pointait notamment que la sortie du nucléaire prévue pour 2025 impliquerait une capacité de production supplémentaire d'au moins 3,6 GW.

Une sortie plus étalée dans le temps

Agoria, Essenscia et Febeliec plaident donc en faveur d'une sortie du nucléaire "plus étalée dans le temps et du maintien en service d'au moins deux centrales après 2025. De plus, l'énergie nucléaire entraîne beaucoup moins de rejets de CO2 que les centrales au gaz et garantit la sécurité et la stabilité de l'approvisionnement".

Les fédérations estiment que cinq réacteurs nucléaires pourraient cesser leur activité comme prévu : le premier en 2022, le second en 2023 et trois autres en 2025 (Doel 1 et 2 et Tihange 1). Mais fermer cinq réacteurs d’un seul coup en 2025 - y compris les plus gros de Doel 4 et Tihange 3 - serait trop risqué. Cela nécessiterait une importation accrue d’électricité de l’étranger, avec des prix très élevés par moment. Les trois fédérations plaident donc pour le maintien en activité prolongé de Doel 4 et Tihange 3.

"L'industrie insiste pour que le gouvernement prenne rapidement une décision définitive concernant les centrales nucléaires portant aussi bien sur la sécurité d'approvisionnement que sur un prix abordable et les émissions de CO2 du parc", concluent les fédérations. Si les positions d’Essenscia et Febeliec sont connues par rapport à la sortie du nucléaire, Agoria représente une nouvelle voix dans ce débat. Et pour cause : elle représente des dizaines d’entreprises qui sont directement liées à l’énergie renouvelable. Comme des producteurs de panneaux solaires, de pompes à chaleur, de moteurs pour les centrales de biomasse, ou encore des entreprises qui fabriquent des pièces détachées pour les éoliennes, ou qui entretiennent ces dernières.

Mais Agoria représente aussi des entreprises classiques du secteur énergétique, y compris des sociétés qui effectuent des mesures de sécurité dans le secteur nucléaire, ainsi que des entreprises informatiques, de télécommunications, de construction et de matériaux. D’après Agoria, l’industrie ne soutiendrait absolument pas d’une seule voix la sortie du nucléaire en 2025.

Ultimatum au gouvernement

La fédération des industries technologiques souligne néanmoins que l’étalement de l’abandon du nucléaire n’enfreint pas au développement de sources d’énergie renouvelable. A terme, elles remplaceront même totalement le nucléaire. Mais Agoria doute que d’ici 2025 l’énergie éolienne, solaire, les centrales au biogaz et à la biomasse, voire même la géothermie parviendront à remplacer complètement l’énergie nucléaire produite actuellement.

Les trois fédérations lancent un ultimatum au gouvernement fédéral, qui se penche actuellement sur un Pacte contenant les lignes de force pour la politique énergétique de la prochaine décennie. Ce pacte doit être prêt d’ici quelques mois. Il est donc temps de prendre des décisions de fond, indiquent les trois fédérations.

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