CETA : "La Belgique a jusqu’à lundi soir"

L'Union européenne et le Canada ont donné à la Belgique jusqu'à lundi soir pour décider si elle soutient leur accord de libre-échange (CETA), bloqué par la Wallonie, sans quoi la cérémonie de signature, prévue jeudi, sera annulée. Les services de la Commission européenne ont transmis dimanche matin deux textes au chef du gouvernement wallon, Paul Magnette. Les deux documents devront être soumis au Parlement wallon.
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Le ministre-président wallon, Paul Magnette (PS), avait déclaré samedi, à l'issue d'une entrevue avec le président du Parlement européen Martin Schulz, qu'il attendait de nouvelles propositions de la Commission européenne et appelé à un report du sommet prévu jeudi à Bruxelles.

Pour rappel, la Wallonie, la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Région bruxelloise ont émis des réticences concernant le texte et la déclaration interprétative censée apaiser les craintes. Les entités fédérées francophones ont donc refusé de déléguer le pouvoir de signature au fédéral tant qu'une série de leurs critiques ne trouvaient pas de réponses satisfaisantes.

La Commission européenne considère désormais que la situation est avant tout un problème intra-belge. Les présidents de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et du Conseil européen Donald Tusk auront lundi un contact avec le Premier ministre belge Charles Michel et avec le Premier ministre canadien Justin Trudeau et détermineront sur cette base si le sommet UE-Canada prévu jeudi est maintenu.

De son côté, le ministre des Affaires étrangères n'ira finalement pas au sommet Amérique Latine - Union européenne, qui se tient mardi et mercredi à Saint-Domingue, en République dominicaine, afin de pouvoir participer aux négociations toujours en cours.

Dans un entretien accordé dimanche aux télévisions publiques flamandes et francophones, la Commissaire européenne aux affaires sociales, Marianne Thyssen, a indiqué "espérer" une signature du traité de libre-échange UE-Canada, comme prévu jeudi, alors que le président du Parti socialiste francophone belge Elio Di Rupo, n'y croit pas. Il a en effet déclaré à la RTBF : "Je ne crois pas qu'il soit possible de signer le CETA jeudi".

Décision conjointe du Canada et de l’UE

"Concernant la date de jeudi, si la Belgique n'est pas en position de dire si elle peut garantir qu'elle va signer, il est très clair pour M. Tusk que cela ne fait aucun sens d'avoir un sommet, et il n'y aura pas de sommet et pas de date fixée pour un nouveau sommet", a expliqué une source proche des institutions européennes.

"Cette décision sera prise d'un commun accord entre M. Tusk et M. Trudeau", a-t-elle précisé. Elle "dépendra beaucoup de ce que le Premier ministre belge, Charles Michel, dira à M. Tusk", a souligné cette même source.

Avant de parler à M. Trudeau, M. Tusk aura eu une "conversation téléphonique avec Charles Michel, qui devra lui dire si la Belgique est en position de signer ou pas l'accord jeudi". Mais auparavant, M. Tusk, qui préside l'organe représentant les 28 Etats membres de l'UE, compte s'entretenir par téléphone avec le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker pour faire le point de la situation lundi.

Deux textes envoyés à la Wallonie

Les services de la Commission européenne ont de leur côté transmis dimanche matin deux textes au chef du gouvernement wallon et au représentant permanent de la Belgique auprès de l'UE, selon un diplomate européen.

Le premier texte d'une page et demie contient un projet de déclaration possible du Royaume de Belgique concernant la protection des investissements "qui contient toutes les réserves dont M. Magnette a fait part", a expliqué un diplomate européen à l’agence française AFP.

Cette question est en effet l'une des plus sensibles du CETA: elle a trait à la possibilité donnée aux multinationales investissant dans un pays étranger de porter plainte contre un Etat adoptant une politique publique contraire à leurs intérêts.

Le traité prévoit la création d'un tribunal permanent composé de 15 juges professionnels nommés par l'UE et le Canada, dont toutes les auditions seraient publiques. Mais les ONG jugent que cette concession ne va pas assez loin et craignent que ces "pseudo-juges" soient des avocats d'affaires liés à des cabinets privés. Et M. Magnette a répété vendredi --jour où la Belgique et l'UE espéraient un oui wallon-- qu'"il restait des difficultés à ce sujet".

Le second texte transmis à M. Magnette est "un questions/réponses de quelques pages "qui répond dans une langue compréhensible à toutes les questions posées par le Parlement wallon", selon le même diplomate. Les deux documents envoyés à Paul Magnette doivent être soumis au Parlement wallon, spécifiquement devant la commission chargée des Affaires européennes de l'assemblée régionale, pour approbation.

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