"Il faut sortir la grande mosquée de l’influence saoudienne"

"Le gouvernement fédéral doit mettre fin au contrôle saoudien de la grande mosquée de Bruxelles (photo), qui représente un terreau fertile pour l’islam extrémiste à Bruxelles, en Belgique et en Europe", estime la parlementaire flamande Yamila Idrissi (SP.A), "si le gouvernement prend au sérieux la lutte contre la radicalisation et le terrorisme". D’autres partis de l’opposition ont déjà questionné cette semaine les relations commerciales entre la Belgique et le royaume saoudien.
BELGA

"Si le gouvernement fédéral prend au sérieux la lutte contre la radicalisation et le terrorisme, il doit mettre un point final au bail emphytéotique conclu entre notre pays et l'Arabie saoudite et travailler à ce que la grande mosquée de Bruxelles devienne un centre européen moderne pour le nouvel islam", estime encore la parlementaire socialiste flamande Yamila Idrissi (photo).

Feu le roi Baudouin a confié le contrôle de la grande mosquée à l'Arabie Saoudite dans les années 1960, par la signature d'un bail de 99 ans. Les Saoudiens "jouent un rôle clé dans la propagation d'une forme radicale de l'islam - le wahhabisme (mouvement politico-religieux saoudien, ndlr) - qui est également défendue par les membres de l'Etat islamique", affirme Idrissi.

"Depuis 1967, des imams et des diplomates saoudiens de la mosquée diffusent la doctrine wahhabite à Bruxelles, en Belgique et en Europe. Cette forme ultra-orthodoxe de l'islam est un terrain fertile pour la radicalisation. Elle ne peut pas avoir de place dans notre société."

La parlementaire socialiste flamande appelle ainsi le Premier ministre à agir. "Si Charles Michel veut s'attaquer à la racine du radicalisme et du terrorisme, il faudra mettre fin au bail de l'Arabie Saoudite à la grande mosquée et bannir le wahhabisme", estime Yamila Idrissi.

Le parti socialiste flamand propose de tendre la main aux intellectuels musulmans modernes et modérés, pour leur confier le développement d'un centre européen de l'islam dans la grande mosquée de Bruxelles.

Reynders : "Pas changer le dialogue avec l’Arabie saoudite"

Jeudi déjà, bon nombre de critiques - émanant notamment de Raoul Hedebouw (PTB) et de Wouter De Vriendt (Groen-Ecolo) - avaient été exprimées sur les relations commerciales entre la Belgique et le royaume saoudien. Un investissement saoudien considérable est en effet annoncé au port d'Anvers. L'Arabie est également un bon client de l'industrie d'armement belge.

"Nous n'allons pas changer notre démarche. Je souhaite un dialogue avec l'Arabie saoudite", avait répondu jeudi le ministre des Affaires Etrangères, Didier Reynders (photo), aux députés qui l'interrogeaient sur les relations avec le royaume saoudien après les attentats de Paris.

Le ministre (MR) a rappelé l'importance d'asseoir l'Arabie saoudite à la table des discussions en vue de trouver une solution politique à la crise syrienne. Il a aussi insisté sur le dialogue mené avec le pays sur la question des droits de l'homme, y compris sur les cas individuels comme celui du blogueur Raef Badawi. "Sans ces contacts, on n'obtient rien", a-t-il fait remarquer.

Didier Reynders a déclaré que le commerce extérieur, de même que l'octroi des licences d'armes, avaient été régionalisés. Les destinations des missions princières sont établies par les Régions. Quant au port d'Anvers, son conseil d'administration inclut des membres de l'opposition, notamment du PTB et de Groen.

Sur la gestion de la grande mosquée du Cinquantenaire, contrôlée par l'Arabie saoudite, le ministre Reynders a précisé qu’un travail est en cours, aussi bien avec d'autres pays qu'avec les entités fédérées belges, pour veiller à ce que le financement des mosquées soit interne et non plus externe, mais aussi pour former des imams en Belgique.

Convention fiscale avec l’Arabie saoudite suspendue

D’après le quotidien De Standaard, le ministre des Finances Johan Van Overtveldt (N-VA, photo) a désormais pris la décision de suspendre la convention fiscale négociée avec l'État saoudien. "A la lumière des événements récents, il nous paraît approprié de réévaluer l'opportunité de cette convention", indique le cabinet du ministre.

Une rupture totale des relations avec le plus grand pays du Golfe persique a par contre été exclue jeudi par le gouvernement. "Nous n'allons pas changer notre démarche. Je souhaite un dialogue avec l'Arabie saoudite", avait commenté le ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders (MR).

Ce n'est pas l'avis du parti d’opposition Ecolo, qui rappelle qu'à côté de la convention fiscale suspendue existent aussi trois autres accords avec l'Arabie saoudite: un accord bilatéral sur les investissements (2001), un traité sur le transport aérien (1986) et une convention de coopération économique (1978).

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