Allocations familiales progressives pour les demandeurs d’asile ?

La N-VA dépose ce lundi un projet de loi proposant de ne verser l’entièreté des allocations familiales qu’aux parents qui résident depuis au moins 4 ans de façon légale en Belgique. "Nous ne visons personne, mais voulons au contraire pouvoir continuer à garantir ce système à tout le monde", explique la députée Sarah Smeyers (N-VA).

"La vague de réfugiés est un fait, et avec cette nouvelle mesure nous voulons garantir la sécurité sociale pour tous les Belges", explique la députée Sarah Smeyers (N-VA, photo), dans les colonnes des quotidiens De Morgen et Het Laatste Nieuws. Cette proposition de loi qui sera déposée ce lundi par la députée indique que la totalité des allocations sociales ne serait octroyée qu’après un séjour légal de quatre ans au moins en Belgique durant les 10 dernières années.

"Nous travaillons néanmoins avec un système progressif", précisait Smeyers dans l’émission "De Ochtend" de la VRT (Radio 1), ce lundi matin.

Concrètement, la N-VA propose d'octroyer 25% du montant des allocations familiales après un an de séjour légal. Après deux ans, la moitié du montant serait octroyée, puis 75% après trois ans et 100% après quatre ans de séjour effectif en Belgique. "Ainsi, les contributions apportées sont en rapport avec les allocations allouées", précise Sarah Smeyers dans sa proposition de loi. Il n’est cependant pas obligatoire d’avoir travaillé pour avoir droit à des allocations familiales.

Modèle danois

Pour rédiger sa proposition, Smeyers s’est basée sur un modèle danois. Ce dernier part du principe que les citoyens qui ont suffisamment contribué peuvent aussi recevoir suffisamment en retour. "Nous voulons pouvoir continuer à garantir des allocations suffisantes. C’est pourquoi nous devons prendre des mesures de précaution, quand il est encore temps".

La nouvelle mesure ne serait pas seulement d’application pour les demandeurs d’asile, mais aussi pour tous les Belges et les expatriés. La N-VA affirme ne pas être en contradiction avec la Convention de Genève, qui protège les droits des réfugiés.

La semaine dernière, la présidente des libéraux d’Open VLD, Gwendolyn Rutten (photo), avait aussi déjà évoqué le modèle danois dans l’émission "De Ochtend" de la VRT. "Cela me semble être une piste qui vaut certainement la peine d’être étudiée à l’échelle de la Flandre", avait-elle déclaré.

Tout comme les nationalistes flamands, les libéraux estiment que des devoirs sont liés aux droits à la sécurité sociale. "Tout le monde sent bien que ce serait un mauvais signal que de donner immédiatement des allocations familiales et un soutien des centres publics d’aide sociale à tous les réfugiés. Cela ne créerait que des problèmes".

Il y a trois semaines, Rutten avait lancé un appel à tous les partis pour résoudre les problèmes dès à présent et proposer de nouvelles règlementations". La N-VA présente donc une proposition concrète ce lundi.

Jasper Jacobs

Compétence régionale

A noter cependant que cette proposition est déposée au niveau national, alors que les allocations familiales sont devenues une compétence des Régions. Sarah Smeyers reconnait que les allocations familiales seront bientôt du ressort régional, "mais l’asile et la migration sont encore des matières fédérales".

La députée estime cependant qu’il est possible juridiquement de modifier la loi sur les allocations via le niveau fédéral. "C’est ce que le président de la Chambre et le constitutionnaliste Hendrik Vuye ont affirmé, et dans le cadre d’une bonne politique d’asile il est nécessaire que le système des allocations familiales soit modifié".

Le projet de loi immédiatement critiqué

"Evidemment que nous ne sommes pas d’accord avec ce projet de loi", réagissait Manu Keirse (photo) de la Ligue des familles dans l’émission "De Ochtend". Il rappelait que le gouvernement actuel a coulé le droit aux allocations familiales dans la législation, comme droit universel pour chaque enfant.

"Les enfants n’ont pas choisi le drame qu’ils vivent. Ils n’ont pas choisi de fuir vers un pays étranger. Ils n’ont pas opté pour la guerre et ne l’ont pas créée. J’estime que l’on doit donner aux enfants le droit à un bon avenir. Cet avenir est déjà suffisamment mis en péril par tout ce qu’ils ont vécu", soulignait Manu Keirse.

Même réaction de la part du Réseau contre la pauvreté (Netwerk tegen armoede). "Les allocations familiales sont un droit inconditionnel pour chaque enfant et c’est un instrument important contre la pauvreté infantile. La proposition de la N-VA ne nous semble pas y correspondre", commentait le coordinateur général du réseau, Frederic Vanhauwaert.

"Allouer l’entièreté des allocations familiales seulement après 4 ans nous paraît également bizarre. La pauvreté infantile est déjà tellement élevée en Flandre. Il faut éviter que les familles ne tombent dans le cercle vicieux de la pauvreté. Il s’agit de personnes pour lesquelles cette aide financière dès le début est justement tellement importante", concluait Vanhauwaert.

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